Kankako se trouve être un district au sein de la commune rurale de Bintimodia, situé à environ cinquante kilomètres du chef lieu de la préfecture de Boké. Ce village est reconnu pour ses activités agricoles et sa production d’huile de palme, qui constituent les principales sources de subsistance de la population locale. Toutefois, au-delà de ces activités, certains habitants se consacrent également à l’élevage, notamment de bœufs, malgré les nombreuses contraintes sociales et économiques qui entravent leur développement. Pour garantir la pérennité et la bonne santé de leur bétail, les éleveurs adoptent une technique ancestrale particulière, nommée Tuppal dans le dialecte local.
De retour de Kankako, un reporter de KAKANDEINFOS.COM nous emmène dans les coulisses de cette pratique légendaire, fermement ancrée dans les coutumes des éleveurs peuls, qui se transmet de génération en génération. Le Peul nourrit en effet un lien indéfectible avec son troupeau bovin, un lien qui résiste aux aléas du temps et qui est fondé sur la maîtrise des pratiques de survie et de soin des animaux. Suivant les traces de Oumar Patagala, un éleveur que nous avons rencontré au cœur de la savane, cet éleveur dévoué explique les diverses étapes de la préparation du Tuppal : « Nous débutons par l’installation de piquets robustes. Puis, nous utilisons de la terre récoltée dans une termitière encore en activité, que nous combinons avec de l’eau propre. Nous y ajoutons une quantité précise de sel, avant de malaxer soigneusement le mélange et d’emmener les animaux », confie-t-il, détaillant patiemment les secrets de cette cérémonie.
Pour approfondir la description de ce rituel, il ajoute : « Ce jour-là, le village se réunit, enfants et adultes prennent part à la cérémonie. Avant de conduire les bœufs à l’abreuvoir, nous préparons cet espace avec des piquets solidement ancrés et reliés par des lianes, recouvert par cette terre soigneusement malaxée. Une fois prêt, une personne guide, à l’aide d’un sifflet, les bœufs vers l’abreuvoir, un moment qui se répète au minimum une fois par mois », précise-t-il avec engagement.
Cette méthode, largement utilisée par les éleveurs guinéens de la région, est réputée pour ses nombreux bénéfices sur la santé des animaux. Selon Oumar Patagala Diallo, « Ce rituel permet aux bœufs de croître de manière optimale. Il facilite leur digestion, booste leur reproduction et contribue à la prévention ou au traitement de maladies telles que la fièvre aphteuse, la brucellose, la dermatose nodulaire contagieuse ou encore la maladie hémorragique épizootique », explique notre interlocuteur avec conviction et expertise.
Malgré les avantages indéniables de cette pratique traditionnelle, les éleveurs de Kankako éprouvent d’énormes difficultés dues au manque de pâturages, les vols de bétail, la détérioration de l’environnement, la pénurie d’eau ainsi que les obstacles logistiques liés au transport des gros engins vers les zones urbaines. Dans un contexte où les traditions tentent de s’harmoniser avec les réalités contemporaines, ces éleveurs continuent de faire preuve de résilience et de créativité pour sauvegarder leur patrimoine culturel et pastoral.
Mamadou KANKAKO